En 2050, la Terre aura atteint le seuil des 10 milliards d’habitants, soit un tiers de plus qu’aujourd’hui. Dix milliards de bouches à nourrir, donc. En 2050 toujours, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture prévoit une hausse de production de 70 % des denrées alimentaires mondiales produites par rapport à 2006, de manière à subvenir aux besoins de tous. Or, actuellement, cette même organisation constate la perte annuelle d’un milliard de dollars de production agricole à l’échelle mondiale après récolte. Pis, les pays industrialisés accuseraient une perte de 10 % de leurs récoltes de graines et de céréales chaque année. Un véritable gâchis.
« Produire mieux, tout en respectant l’environnement »
Heureusement, il y a la « smart agriculture » dont « le but n’est pas obligatoirement de produire plus, mais de produire mieux, tout en respectant l’environnement », explique Andrea Vitaletti, professeur en ingénierie informatique à l’université de La Sapienza, à Rome (voir la vidéo ci-dessous).
Ce chercheur italien sait de quoi il parle : ces dernières années, il a élaboré PLEASED (pour PLants Employed As SEnsing Devices), un projet visant à récolter des datas par signal électrique via des circuits Arduino connectés à des plantes. « On s’est notamment rendu compte que les plantes avaient des capacités de communication. Donc il est possible – pas forcément viable, mais possible – que les plantes puissent communiquer grâce à des objets connectés à l’avenir », développe-t-il. Avec toujours cette même idée d’appréhension de l’environnement et du biotope afin de permettre une meilleure exploitation dans les années à venir. « La possibilité de mesurer un phénomène est toujours la première étape vers sa meilleure compréhension », rappelle d’ailleurs Andrea Vitaletti.
8 % d’eau économisés grâce à la « smart agriculture »
L’agriculture intelligente, parfois appelée Internet of crops (« l’Internet des cultures ») ou agriculture de précision, comment ça marche exactement ? Via divers objets connectés ou capteurs, il est désormais possible de collecter un nombre très important de données afin d’adapter sa méthode agricole pour un meilleur rendement et éviter toutes sortes de gaspillage.
« Actuellement, l’une des questions cruciales de l’agriculture est « comment gérer l’eau de manière plus efficace ? », poursuit le scientifique italien. Si vous êtes sur une colline, le haut nécessite plus d’eau que le bas, et la répartition est inégale. L’agriculture de précision apporte juste ce qu’il faut d’eau, de nutriments ou de produits chimiques à la partie agricole à l’endroit voulu, au moment voulu. Pour ça, on a une machine connectée dédiée capable de mesurer les paramètres nécessaires pour une bonne irrigation. » D’après une étude de la société OnFarm, les agriculteurs américains qui ont adopté l’agriculture de précision ont réduit de 8 % leur utilisation d’eau.
Des drones et des tracteurs sans conducteur
« Nous disposons également de drones ou d’images satellitaires, qui permettent de faire des analyses spectrales des champs afin de pénétrer dans ces derniers en profondeur tout en restant à la surface, savoir quel champ a plus besoin de soin qu’un autre » ajoute Andrea Vitaletti, qui parle de l’Internet of crops comme d’un « bénéfice pour l’agriculture ».
Autre possibilité pour les agriculteurs ? Celle de gérer leurs stocks, leurs équipements ou encore leur bétail directement depuis un smartphone ou une tablette. Quant aux tracteurs sans conducteur, le constructeur John Deere y travaille actuellement. Une aubaine qui permettrait aux agriculteurs de rentabiliser leur labeur tout en réduisant sa pénibilité. Aux États-Unis toujours, où l’adaptation à l’agriculture intelligente est bien plus avancée qu’ailleurs, on constate une production céréalière doublée par les objets connectés (7,3 tonnes par hectare contre 3,8 à l’échelle mondiale).
Enfin, OnFarm considère que 75 millions d’objets connectés seront installés dans l’industrie agricole mondiale d’ici 2020, puis qu’ils dépasseront le million de points de données collectées chaque jour à partir de 2025. D’ici là, espérons que les 8 milliards d’humains auront appris à ne plus gaspiller grâce à l’agriculture intelligente.