Fruit de la recherche d’Orange Labs, le NG PoP est un nouveau type de sites hébergeant des équipements de l’infrastructure de l’opérateur de réseau. Il permet l’optimisation globale du cout des réseaux fixes et mobiles et contribue à offrir aux clients des services de communication de meilleure qualité.
Pour des raisons historiques et de règlementation, les réseaux fixes et mobiles utilisent généralement des infrastructures indépendantes, ce qui entraine pour l’opérateur possédant les deux raisons des surcoûts important. De plus, si avant l’arrivée d’internet, les revenus des opérateurs étaient principalement liés à la durée et à la distance des appels téléphoniques, ces revenues dépendent désormais d’offres de voix et d’accès internet illimitées, alors que les demandes en débit et en volume augmentent constamment. Les opérateurs doivent donc rechercher des solutions afin d’optimiser leurs réseaux et de réduire le coût de leur infrastructure.
La convergence des réseaux fixes et mobiles
La convergence des infrastructures des réseaux fixes et mobiles est une orientation privilégiée dans le concept de NG PoP. Cette convergence peut se concrétiser à trois niveaux :
- le réseau d’accès: les antennes radio pour le réseau mobile et les câbles de fibres optique jusque chez l’abonné pour le réseau fixe.
- le cœur de réseau : c’est le lieu où tout le trafic réseau est agrégé et traité, et c’est à travers celui-ci que le trafic est redirigé vers le réseau internet mondial, à travers ce que l’on appelle des points de peering.
- les plateformes de service: ce sont les serveurs fournissant les contenus tels que la TV live, la vidéo à la demande, la téléphonie IP etc.
Le NG PoP, selon le besoin, est capable d’adresser ces trois types de convergence. Mais commençons par présenter les opportunités d’optimisation et de convergence du réseau d’accès.
Optimisation du réseau d’accès
Le déploiement en cours de la fibre optique par Orange est une réelle opportunité de déployer des premiers sites NG PoP. Mais qu’est-ce que le FTTH ?
Désignant Fiber To The Home ou câble de fibre optique jusqu’au domicile, il s’agit d’une technologie qui définit un type d’infrastructure de communication permettant l’accès à Internet et aux services associés à des débits capables d’atteindre 1Gbit/s symétrique, soit des débits très supérieurs à ceux de la paire de cuivre. Cela permet de disposer sur une même fibre d’une bande passante dans le sens descendant et dans le sens remontant, qui est partagée entre plusieurs clients. L’architecture technique utilisée est dite « passive », du fait que les coupleurs optiques n’ont pas besoin d’être alimentés. Le fait d’apporter la fibre optique jusqu’au client impose le déploiement d’une nouvelle boucle locale, composée exclusivement de câbles, connecteurs, répartiteurs et boîtiers optiques. Le site regroupant ces équipements et agrégeant les câbles issus des domiciles des abonnés est appelé Nœud de Raccordement Abonnés (NRA). La continuité optique de bout en bout impose l’introduction d’un modem optique chez le client.
Pour ce qui est de la fourniture des services d’Orange, le raccordement au réseau de collecte et aux plates-formes de service s’opère de la même manière qu’en ADSL (Asymmetrical Digital Subscriber Line), les débits transportés étant beaucoup plus importants (jusqu’à 1Gbit/s symétrique par client).
De plus la portée de la fibre optique est bien plus importante que celle du cuivre utilisé en ADSL, car la fibre n’est pas soumise aux perturbations électromagnétiques. Ainsi les nœuds de raccordement abonnés peuvent gérer des zones géographiques bien plus importante (jusqu’à 20 km de rayon) et donc un nombre d’abonnés bien plus important. Le déploiement de la fibre est donc une réelle opportunité pour réduire significativement le nombre de nœuds de raccordement, qui sont aujourd’hui de l’ordre de 15 000 en France. Les études réalisées dans le cadre du projet de recherche NG PoP montrent une réduction du nombre de site pouvant aller jusqu’à 80 %.
Convergence du réseau d’accès
Aujourd’hui les sites d’antennes radio pour le réseau mobile (appelée station de base) sont composés du mat de l’antenne, visible dans les points hauts du territoire (toits d’immeuble, tours…) et d’un module appelé Base Band Unit ou unité bande de base, permettant de démoduler le signal radio en bande de base. Ce module impose de maintenir une source d’énergie électrique et un local ou au minimum une armoire pour héberger le module. Cependant, si de la fibre optique est disponible entre la station de base et le site d’agrégation, une nouvelle technologie appelée Cloud-RAN permet de déporter la fonction bande de base de chaque station vers le site d’agrégation. De plus les modules bande de base hébergés alors dans ce site peuvent être mutualisés dans un seul équipement gérant la fonction pour toutes les antennes de la zone gérée.
Distribution des passerelles du cœur de réseau mobile
Que ce soit en 3G ou plus récemment en 4G, le cœur de réseau mobile est généralement centralisé, avec quelques équipements appelés passerelles mobiles. Ce sont elles qui gèrent le montage des sessions de données permettant à l’usager d’accéder à Internet. Elles servent également de transition entre le monde mobile et le monde internet, ce qui signifie que tout trafic mobile doit nécessairement traverser ces équipements. Du fait que ces équipements sont hébergés de manière centralisée, cela peut dans certains cas empêcher certaines techniques d’optimisation du réseau : à titre d’exemple, la mise en place de caches pour héberger des contenus très demandés plus proches des utilisateurs, permet de moins solliciter les serveurs de contenus et de soulager le réseau de transport. Cependant, du fait que le cœur de réseau reste centralisé, les caches ne seront pas bénéfiques, puisque le trafic traversera ces passerelles mobiles très éloignées pour revenir vers les serveurs de cache. Une solution pour remédier à cela est d’héberger dans des sites NG PoP à la fois ces passerelles mobiles et les éventuels serveurs cache de contenus. Le NG PoP étant par nature distribué sur tout le territoire, les avantages attendus seront alors assurés.
Passerelles du cœur de réseau fixe et Livebox virtuelle
Tout comme le réseau mobile, le réseau fixe dispose d’un cœur de réseau et d’une passerelle vers les réseaux IP et vers internet. Dans le réseau fixe, elle se nomme Broadband Network Gateway ou passerelle réseau à large bande. Les fonctions de la passerelle du réseau fixe sont similaires à celles des passerelles mobiles, même si les mécanismes et les protocoles sont différents. En effet toutes ces passerelles réseau gèrent l’authentification et l’autorisation de l’utilisateur, l’attribution de l’adresse IP, le contrôle de flux etc. Ce qui fait qu’il est possible, moyennant quelques adaptations, de mutualiser ces fonctions dans le même équipement. Ainsi un site NG PoP pourra héberger ces passerelles fixe et mobile de manière optimale.
D’autre part, une innovation intéressante est également susceptible d’être hébergée dans le NG PoP : la Livebox virtuelle. Issue des laboratoires d’Orange Labs, il s’agit d’un nouveau concept de Livebox, et si elle n’est pas encore déployée à ce jour, son potentiel est prometteur en terme de réduction de couts opérationnels pour Orange et de meilleur qualité d’expérience et de service après vente pour le client. Mais en quoi cela consiste-t-il exactement ?
Aujourd’hui tous les fournisseurs d’accès internet mettent à disposition de leurs clients des « box », comme la Livebox pour Orange. Cet équipement est avant tout un modem ; il a pour principal rôle de transformer le signal électrique issue de la prise téléphonique ou fibre optique en données IP. Cependant, avec l’arrivée du triple play et afin de fournir de nouveaux services et de prendre en compte les nouveaux usages, la Livebox s’est beaucoup sophistiquée avec le temps et propose aujourd’hui de nombreuses fonctionnalités : gestion du réseau domestique, gestion du Wi-Fi, sécurité, domotique, support de la TV et de la téléphonie IP, serveur média, domotique, support de UPnP etc. La conception, la production et la maintenance des versions successives de ces Livebox amène une complexité et des coûts croissants à l’opérateur et peut entrainer de nombreux problèmes de service après vente au client. L’idée de Livebox virtuelle consiste à limiter l’équipement chez le client au minimum matériel, et de déporter dans le réseau toute l’intelligence et toutes les fonctions avancées. Ainsi, l’équipement chez le client est simplifié et bon marché, et l’ensemble des services de la Livebox sont gérés depuis et dans le réseau. A chaque client correspond dans le NG PoP gérant sa zone géographique une instance logicielle de Livebox virtuelle gérant tous ses services. En cas de mise à jour d’un service ou d’ajout d’un nouveau, c’est transparent pour l’utilisateur, qui n’a plus à subir de blocage de l’équipement durant la mise à jour.
D’autre part, d’un point de vue réseau, les fonctions de la Livebox virtuelle peuvent être assimilées à celles de la passerelle du réseau fixe citée plus haut. Ainsi, certaines implémentations montrent une passerelle composée d’un switch programmable et d’autant d’instances logicielles de Livebox virtuelles que de clients.
Implémentation du NG PoP
Grâce au succès d’internet et de l’informatique, les équipements dits IT sont de moins en moins chers. Mais malgré cela, il y a une dizaine d’années, ils n’étaient pas adaptés aux contraintes fortes du monde des télécommunications en terme de performance et de robustesse. Cependant, grâce à la loi de Moore et à l’amélioration continue des technologies électroniques, le matériel informatique ou IT est de plus en plus à même de répondre aux contraintes des opérateurs de télécommunications. Les études menées au sein du projet de recherche NG PoP et ailleurs à Orange Labs ont confirmé la pertinence de cette approche.
Virtualisation du réseau
Cependant, même avec des équipements IT bon marché, déployer une machine pour chaque fonction peut s’avérer couteux, d’autant que les sites NG PoP seront nombreux, car distribués sur tout le territoire national. La mutualisation des ressources matérielles est donc nécessaire. Pour résoudre ce problème, la solution est encore une fois issue du monde informatique et des data centre: la virtualisation. C’est une technique permettant d’exécuter simultanément plusieurs systèmes d’exploitation (Linux, Windows…) sur le même serveur, en isolant chacun dans ce que l’on appelle une machine virtuelle. Du point de vue du système d’exploitation, il est exécuté dans un serveur dédié, avec ses propres ressources d’exécution (processeurs) et de stockage (disques durs). En réalité, les ressources du serveur physique sont partagées entre les machines virtuelle mais une isolation est assurée, permettant à chaque machine de n’utiliser que les ressources qui lui ont été allouées à sa création. Parmi les principales solutions de virtualisation du marché on trouve VMware (propriétaire) ou KVM (open source).
Le succès du NG PoP dépend donc des possibilités de virtualisation des fonctions réseaux, et pour cela l’industrie des télécommunications a prit une orientation forte dans ce sens, avec d’importantes initiatives comme le groupe « ISG NFV » à l’ETSI, l’organisme européen de normalisation des télécommunications.
Contrôle du réseau par logiciel
Enfin la virtualisation du réseau va de paire avec le paradigme « SDN » (Software Defined Network) ou réseau défini de manière logicielle. L’idée est de séparer le trafic des utilisateurs du trafic de signalisation et de contrôle. Pour cela, les équipements du réseau tels que les switches et routeurs doivent être contrôlable par des logiciels externes appelés contrôleurs, via des protocoles standardisés tels que Openflow ou Netconf. Ainsi, ces équipements n’auront qu’à implémenter les règles dictées par les contrôleurs. A l’échelle du réseau, les équipements étant contrôlables à partir de ces logiciels, cela devrait apporter plus de flexibilité à l’opérateur pour la mise en place de nouvelles règles de routage des flux. A titre d’exemple appliqué au NG PoP, si celui-ci héberge un serveur de cache vidéo et un switch contrôlé par logiciel, il est possible d’adapter aisément les trafics vidéo d’un groupe d’utilisateur donné pour qu’ils traversent le serveur de cache avant de solliciter le serveur de contenu d’origine. L’application des règles ne se fait qu’au niveau des logiciels contrôleurs. Il y a aujourd’hui une grande effervescence dans l’industrie des télécommunications autour du paradigme SDN et de nombreux contrôleurs très avancés ont vu le jour, comme Opendaylight ou Contrail. Aujourd’hui, le contrôle du réseau par logiciel est indissociable de la virtualisation de fonctions réseau dans les organismes de standardisation et autres forum.
La vidéo suivante illustre le concept de NG PoP à travers des animations didactiques et des interviews d’experts d’Orange :
Autres usages possibles du NG PoP
Au delà de ses fonctions d’agrégation et de convergence entre les réseaux fixes et mobiles, disposer de sites distribués sur tout le territoire et hébergeant de petits data centres, peut s’avérer utile pour héberger tout service dont les contraintes sont telles qu’il est préférable de l’héberger proche des utilisateurs finaux, comme par exemple pour des jeux en ligne, du Cloud personnel etc.
Enfin, le NG PoP, de par sa localisation, peut se comporter comme un proxy ou médiateur pour le réseau, entre les utilisateurs et les fournisseurs de service du web tels que Google, Akamai (opérateur de caches de contenus), Microsoft etc.
Conclusion
Les déploiements en cours de la fibre et de la 4G vont impacter fortement l’infrastructure du réseau d’Orange et sont une opportunité pour déployer des sites NG PoP. Cela permettra à l’opérateur de faire converger les réseaux d’accès fixes et mobiles, ainsi que permettre l’hébergement de fonctions réseau et de plateformes de services à la périphérie du réseau, plus proches des utilisateurs, et ce en optimisant les coûts. En terme d’implémentation, l’usage de matériel informatique, de techniques de virtualisation de fonctions réseau et d’architectures réseau contrôlés par logiciels, sont les clés du succès des NG PoP.