• Cet outil offre des opportunités importantes au secteur de la parfumerie, mais également à l’agroalimentaire, en quête de précision dans le contrôle qualité.
• S’il n’a pas vocation à imiter le « nez du chien », ce capteur peut à terme aider le personnel soignant à évaluer la gravité de certaines infections, en analysant l’haleine ou l’odeur des plaies.
Et s’il était possible de détecter un feu grâce à des capteurs d’odorat avant même les premières flammes ? Voire d’être en mesure de savoir si un patient est atteint d’une bactérie spécifique, grâce à un nez artificiel ? Depuis les années 80, de nombreux chercheurs travaillent à développer un nez artificiel mais, jusqu’à présent, les capteurs proposés n’étaient pas assez précis ou trop peu exhaustifs. À Grenoble, Aryballe Technologies, une start-up issue du CEA, développe un objet connecté qui répond à ce besoin. Il est composé d’une partie « capteur », et d’une partie informatique avancée. « Dans les années 2000, on m’a présenté au MIT la possibilité d’utiliser des biocapteurs et un système de transmission optique pour faire des images à partir des profils d’odeurs », explique Tristan Rousselle, le dirigeant de la société. Le procédé est donc relativement proche de ce qui est réalisé dans le domaine des diagnostics médicaux : « Quand on envoie un échantillon pour un diagnostic médical, il passe sur une machine qui contient des anticorps capables de détecter des molécules et ainsi savoir si on est malade. La différence avec l’odorat, c’est qu’on parle de molécules qui sont en phase gazeuse. Il nous fallait donc adapter ces systèmes. »
Les clients ont besoin d’analyser des données dont les composants sont très dilués dans l’air, de la même manière que l’on verserait une tasse de café dans une piscine
Analyser les odeurs grâce aux signaux lumineux
Pour fabriquer un tel capteur, Aryballe Technologies utilise des peptides. Ils s’inspirent des séquences de protéines capables de réagir avec des . « Ces peptides sont des fragments de molécules qui jouent le rôle de biocapteurs. Ensuite, on perturbe un signal lumineux de manière proportionnelle à la quantité de molécules dans l’air pour réaliser une mesure », note Tristan Rousselle. Au centre de ce capteur, une plaque de silicium composée de 64 nanocapteurs biochimiques (peptides) envoie donc 64 signaux lumineux. « Chaque odeur va générer un schéma sur les capteurs qui le transforme en signal lumineux. » Par la suite, la technologie intégrée dans l’objet connecté utilise le machine learning à partir d’une base de référence pour identifier les odeurs. Le dispositif est capable, si les capteurs sont sensibles à l’humidité, de soustraire celle-ci de la signature olfactive des odeurs.
De nombreuses applications industrielles
Les usages de ces technologies sont potentiellement nombreux. La start-up compte des clients dans plusieurs domaines dont le contrôle qualité dans la parfumerie. « Les clients ont besoin d’analyser les données de composants qui sont, eux, très dilués dans l’air, de la même manière que l’on verserait une tasse de café dans une piscine. » La solution ne réplique pas « le nez du chien » (pour chercher de la drogue ou des corps), mais peut détecter des incendies et répondre à d’autres attentes en matière de sécurité : « Dans de nombreux cas, l’odeur précède le feu. On est capable de savoir s’il y a une odeur de plastique brûlé dans une voiture ou dans une centrale électrique pour donner les premiers signes d’alerte. ». Pour l’industrie agroalimentaire, un nez artificiel est également pertinent pour suivre la maturité des fruits et des légumes grâce aux odeurs qui sortent des produits, voire pour détecter des odeurs de putréfaction lors du transport de marchandises. « Nous sommes également spécialisés dans la fermentation, et nous comptons des clients dans le domaine de la bière, du fromage, etc. »
Le secteur de la santé ciblé
La santé est le prochain secteur susceptible de bénéficier de ces technologies. « Nous étions discrets sur ce sujet, car il y a eu beaucoup de buzz au sujet d’innovations capables d’imiter le nez du chien. Nous avons donc décidé de nous recentrer sur les odeurs bactériennes, c’est-à-dire sur la capacité de notre innovation à déceler la gravité d’une plaie, par exemple en cas de plaie chez un diabétique, ou encore en cas d’infection pulmonaire. Nous réalisons par ailleurs des tests sur les haleines et autres odeurs corporelles. Ce qui importe pour les professionnels, c’est le résultat et les applications microbiologiques. »
composés organiques volatils (COV)
Les composés organiques volatils regroupent une multitude de substances, qui peuvent être d’origine biogénique (naturelle) ou anthropique (humaine). Ils se caractérisent par leur grande volatilité et se répandent aisément dans l’atmosphère, des ateliers et des bureaux. Source : Ademe.