• Les smartphones sont également utilisés pour le suivi des animaux, comme le montre une étude sur les cacatoès en Australie, où des balises Bluetooth à faible consommation d’énergie, couplées à un réseau de smartphones, permettent de suivre les déplacements des oiseaux.
• Cette approche respecte la vie privée des utilisateurs, en ne transmettant que les données nécessaires. A l’avenir, grâce à l’intelligence artificielle, elle pourrait permettre de mieux comprendre les comportements animaux.
Nos smartphones sont plus puissants qu’on l’imagine. Le , c’est-à-dire la production participative et l’exploitation des données ou métadonnées de milliers de smartphones appartenant aux citoyens, se transforme un nouvel outil de recherche scientifique. Mi-novembre, une étude menée par Google Research, associée aux universités Harvard et du Colorado, a permis de mesurer l’état de l’ionosphère — une couche de l’atmosphère — grâce à des téléphones avec puces GPS. « Bien que chaque téléphone mobile fournisse à lui seul des relevés bruyants, nous démontrons qu’un vaste réseau crowdsourcé de signaux agrégés peut agir comme un instrument scientifique extrêmement sensible », explique Google. « Nous avons constaté que les mesures effectuées à l’aide de téléphones portables permettent de saisir des caractéristiques de l’ionosphère importantes d’un point de vue scientifique, en fournissant des détails sans précédent dans des régions où les stations de surveillance sont peu nombreuses. » Ces outils puissants que nous avons toutes et tous dans nos poches peuvent également s’avérer précieux pour les études écologiques et en conservation animalière.
Le système fonctionne aussi bien — voire mieux — que les balises GPS utilisées jusqu’à présent
Un réseau de smartphone et de balises
Être capable de suivre les animaux permet de comprendre leurs déplacements, leur comportement social ou leur adaptation à différents environnements. Cependant, les méthodes traditionnelles, telles que les balises GPS, sont coûteuses et énergivores. Damien Farine, professeur adjoint à l’Australian National University et professeur Eccellenza à l’Université de Zurich, a mis au point avec son équipe une solution novatrice basée sur les balises Bluetooth à basse énergie (BLE) et un réseau participatif constitué des smartphones des citoyens. L’équipe a équipé de balises BLE des cacatoès à huppe jaune, des perroquets vivant dans des zones urbaines à Canberra (Australie). « Nous avons attaché des balises à des cacatoès qui se déplacent dans Canberra. À partir des données collectées, nous avons constaté que chaque oiseau était détecté en moyenne toutes les quelques minutes. Cela signifie que le système fonctionne aussi bien — voire mieux — que les balises GPS utilisées jusqu’à présent. » Les données ont permis de cartographier les déplacements des oiseaux en détail, offrant une nouvelle manière de suivre les populations animales dans des milieux urbains.
Une idée inspirée des AirTags d’Apple
Selon Damien Farine, « les AirTags d’Apple fonctionnent grâce à tous les appareils Apple connectés au cloud, tels que les iPhones ou les montres connectées ; notre idée était que, si nous pouvions utiliser ce réseau pour détecter des animaux, cela nous donnerait un moyen puissant de les suivre dans les zones urbaines ». Les balises BLE, simples à construire et coûtant moins de 10 euros, envoient un signal, contenant une identité unique, qui peut être capté par un appareil proche. L’appareil transmet ensuite les coordonnées GPS et l’identité de la balise au cloud. La solution est abordable et durable. « Toutes les solutions impliquent des compromis importants. Par exemple, les balises GPS sont coûteuses et consomment beaucoup d’énergie, ce qui signifie soit qu’elles sont lourdes (grandes batteries), soit qu’elles collectent très peu de points de données (petites batteries). Notre solution permet à une balise de collecter des données pendant plusieurs années avec une seule petite batterie. »
Respect de la vie privée
L’un des principaux avantages de cette technologie réside dans son respect de la vie privée. « Aucune information sur l’identité de l’appareil n’est transmise, seulement une marque temporelle, l’identité de la balise BLE et une position GPS. Ainsi, dans les zones urbaines où il y a de nombreux utilisateurs de téléphones, il n’y a pas de problème de confidentialité. » Le chercheur envisage déjà des améliorations futures. « Le machine learning est très puissant, et nous commençons à peine à découvrir toutes ses applications. Nous anticipons qu’à l’avenir, nos balises pourront être associées à un accéléromètre… Cela nous permettra de savoir non seulement où se trouvent les animaux (grâce à la balise), mais aussi ce qu’ils font sur place (leur comportement grâce à l’accéléromètre). »
Sources :
Low-cost animal tracking using Bluetooth low energy beacons on a crowd-sourced network (en anglais)
En savoir plus :
The Internet of Animals (en anglais)
Le crowdsourcing consiste à externaliser une activité vers la foule (crowd), c’est-à-dire vers des utilisateurs anonymes et volontaires. Apparu avec l’essor du Web2.0, qui facilite la mise en relation d’acteurs dispersés, il incarne une méthode qui permet d’externaliser la production d’informations, comme c’est le cas par exemple pour les informations partagées par les automobilistes sur des applications de circulation comme Waze.