- Une équipe d’Orange Innovation China a développé un outil capable de mesurer les émissions de gaz à effet de serre des différents modèles d’intelligence artificielle en tenant compte de leur contexte d’exploitation.
- L’outil peut générer des recommandations d’optimisation pour contribuer à la réduction de cette empreinte carbone. Il pourra à l’avenir aider à l’écoconception des modèles d’IA.
Lors des Orange Open Tech Days 2023, une équipe de chercheurs d’Orange Innovation China font la démonstration en live d’un outil conçu pour mesurer l’empreinte carbone de l’IA et proposer des recommandations pour son optimisation. En raison du changement climatique, un tel instrument est devenu essentiel pour anticiper l’impact des technologies du futur sur l’environnement. « L’IA peut aider à réduire l’empreinte carbone de l’humanité. D’ici 2030, les estimations montrent qu’elle peut participer à la transition écologique en réduisant les émissions de gaz à effet de serre (GES) de 5 à 10%, détaille Lan Wang, d’Orange Innovation China, dont le laboratoire est implanté à Pékin. Mais on ne peut pas ignorer les émissions de GES générées par l’IA elle-même. C’est une technologie qui peut être très énergivore, notamment pour les outils comme ChatGPT. » L’apprentissage automatique d’un seul consomme autant d’énergie que 56 citoyens américains moyens durant une année.
L’IA peut aider à réduire l’empreinte carbone de l’humanité. Mais on ne peut pas ignorer les émissions de gaz à effet de serre générées par l’IA elle-même.
Une IA adaptée aux besoins
L’outil du projet « AI & carbon footprint – Measure & optimize a system » repose sur quatre piliers. « Nous voulions questionner les usages de l’IA, explique Lan Wang. Si je peux aller à tel endroit à vélo, pourquoi devrais-je m’y rendre en voiture ? C’est exactement le même raisonnement concernant l’IA. » Second fondement : optimiser l’énergie, notamment en évaluant l’impact environnemental des serveurs cloud d’une IA donnée en fonction de leur localisation. L’outil tient ainsi compte des législations en matière d’environnement, des différents mix énergétiques (et notamment de la part d’énergies renouvelables), ou encore de l’intensité carbone de chaque pays. « Limiter l’amplitude de l’apprentissage automatique en proposant des modèles d’IA adaptés aux besoins constituait notre troisième pilier, poursuit Lan Wang. Dans certains cas, multiplier les cycles complets d’apprentissage (Epoch) ne mène pas forcément à de meilleures performances, car celles-ci atteignent une limite où l’on ne progresse quasiment plus, pour des consommations en énergie importante. » Enfin, dernier point : développer des algorithmes d’IA eux-mêmes plus vertueux, en mesurant leur empreinte carbone et en optimisant les modèles.
Empreinte carbone réduite
Pour mesurer l’empreinte carbone d’une IA, l’outil imaginé par les chercheurs d’Orange Innovation China collecte les données en temps réel. Il fournit des comparaisons statistiques, par exemple le nombre d’arbres qu’il faudrait pour séquestrer le carbone émis du fait de l’utilisation de l’IA. « Ensuite, pour optimiser les modèles, l’outil propose différentes solutions, comme la baisse du nombre d’opérations ou la réduction des couches logiques du modèle, indique Lan Wang. Grâce à la méthode dite de ‘knowledge distillation’, un modèle d’IA puissant est capable d’entraîner des IA plus petites – des ‘ ’. On peut ainsi réduire considérablement la puissance de calcul nécessaire à l’usage, et donc la consommation en énergie en proportion, pour une baisse de performances des student models inférieure à 10%. » Dans le cadre de ses recherches, le laboratoire a obtenu jusqu’à 70% de baisse de consommation énergétique durant la phase d’entraînement, et 60% lors de la phase d’ . « Adapter les besoins en IA en fonction des besoins des utilisateurs a des conséquences très positives pour des raisons tant environnementales qu’économiques. »
Un potentiel important
Dans le cadre de la démonstration organisée aux Orange Open Tech Days sont présentés deux modèles d’IA entraînés pour le suivi d’objets multiples (ici en l’occurrence lors d’un match de football). Le premier est le modèle original, avant optimisation. Le second est le student model qui, après optimisation via l’outil, tournera sur du matériel informatique moins puissant. Les visiteurs pourront ensuite comparer les résultats directement à l’écran. « L’un des avantages de notre outil réside dans le fait qu’il est facile à installer, à utiliser, et compatible avec la plupart des matériels informatiques existant car il est interopérable », précise encore Lan Wang. L’outil est destiné à tous les utilisateurs d’IA, aux fournisseurs de serveurs et de clouds, aux chercheurs, etc. Il devra à l’avenir être directement intégré aux méthodes d’éco-conception des IA. Cependant, il reste encore du chemin à parcourir avant la version définitive. « Nous sommes encore en phase de recherche, même si notre outil est en réalité déjà opérationnel. Il fonctionne, mais son potentiel est bien plus vaste », conclut Lan Wang. Après les émissions de GES, une adaptation de l’outil à la mesure de l’impact des IA sur l’eau est par ailleurs d’ores et déjà en chantier.