“Offrir un meilleur accès à la justice et faire émerger une expertise juridique augmentée.” ______________ “Les solutions d’IA visant une meilleure compréhension des écosystèmes et de la biodiversité sont particulièrement intéressantes.”
Grâce à des avancées majeures réalisées ces dernières années, en particulier dans le domaine de l’apprentissage automatique (machine learning), l’intelligence artificielle (IA) offre de nouvelles perspectives. Avec le big data, le décuplement des puissances de calcul, ou encore le développement d’algorithmes novateurs, ses applications se multiplient et se diversifient. De la recherche dans le domaine de la santé aux économies d’énergie, en passant par le domaine juridique, l’IA a commencé à transformer en profondeur de nombreux secteurs et industries.
L’IA fait avancer la recherche médicale
Aide au diagnostic, chirurgie assistée par ordinateur, robots compagnons, médecine prédictive, anticipation d’une épidémie… L’IA est au cœur de la médecine du futur. Si elle permet de mieux diagnostiquer et soigner la maladie, elle offre également la possibilité d’inventer de nouveaux traitements. En effet, les hôpitaux génèrent de plus en plus de données médicales, dont seulement une petite partie est aujourd’hui exploitée. L’IA permet de collecter et analyser ces données brutes pour les transformer en connaissance et accélérer ainsi la recherche médicale.
En France, l’Institut Curie, qui mise sur le big data et l’IA pour faire avancer la lutte contre le cancer et améliorer les soins, collecte les données de santé des patients depuis plus de dix ans.
En 2018, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) s’associait à la start-up française Owkin, spécialisée dans le machine learning appliqué à la recherche médicale, dans le but de permettre aux chercheurs d’exploiter les données massives et hétérogènes produites ou utilisées par l’institut grâce au logiciel Socrates. Cette plateforme “utilise les technologies de machine learning pour analyser des bibliothèques d’imagerie médicale, des données moléculaires de type génomique, ainsi que des ensembles de données cliniques, pour découvrir des modèles de biomarqueurs complexes associés à des maladies ou à des réponses variables aux traitements”.
Pour en savoir plus :
LL’intelligence artificielle au service de la recherche médicale : l’Inserm et Owkin s’associent
L’IA au service de la santé mentale
Depuis plusieurs années, les chercheurs s’intéressent aussi au diagnostic et au traitement des troubles mentaux. Parmi eux, la dépression, qui touche, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), 300 millions de personnes à l’échelle planétaire. C’est l’une des principales causes de handicap dans le monde.
Des chercheurs de l’Institut de technologie du Massachusetts (MIT), aux États-Unis, ont récemment présenté un réseau de neurones capable d’analyser des données textuelles et audio brutes issues d’entretiens pour détecter la dépression. L’innovation clé réside dans le fait que le modèle peut déterminer si un patient est déprimé en interprétant les mots utilisés et la façon dont ils sont formulés. C’est ce que les chercheurs appellent une analyse “sans contexte” (“context-free”), car elle ne repose pas sur des réponses apportées à des questions spécifiques comme c’est le cas avec les autres modèles. Cela signifie que la technique de modélisation séquentielle qu’ils ont mise au point pourrait être utilisée pour analyser des conversations naturelles, menées en dehors d’un entretien formalisé avec un clinicien.
Pour en savoir plus :
Model can more naturally detect depression in conversations
L’IA pour décrypter les documents juridiques
Les avancées de l’IA transforment également la pratique traditionnelle du droit. Au-delà du fantasme d’une justice prédictive à la Minority Report, il s’agit ici d’offrir un meilleur accès à la justice et de faire émerger une expertise juridique augmentée. En plein essor, la legaltech fait ainsi référence à l’usage de la technologie pour offrir des services juridiques, et à une myriade de start-up qui proposent des solutions d’IA s’adressant aussi bien aux professionnels du droit (le moteur de recherche juridique Doctrine, par exemple), qu’aux PME et particuliers.
Créée en 2017, la jeune pousse française Hyperlex veut rendre le juridique accessible à tous – et moins chronophage – au sein des entreprises. Sa plateforme d’IA permet aux utilisateurs de gérer leurs contrats et documents juridiques. Grâce au machine learning, l’outil analyse et retrouve automatiquement les informations importantes (clauses, dates clés, montants, etc.). Il est capable de s’adapter aux évolutions réglementaires et de prendre en compte la diversité des différents droits nationaux, quelle que soit l’activité de l’entreprise, et peut être utilisé dans de nombreux cas : analyse et gestion quotidienne des contrats, audit, maintien en conformité, due diligence…
L’IA pour protéger l’environnement
L’IA ouvre de nombreuses opportunités pour la préservation de l’environnement.
“De la reforestation par les drones en passant par la cartographie des espèces vivantes via les nouvelles possibilités fournies par la reconnaissance d’image, l’IA nous fournit des outils toujours plus nombreux et puissants pour réellement entrer dans la transition écologique”, peut-on lire dans le rapport du mathématicien et député Cédric Villani intitulé Donner un sens à l’intelligence artificielle.
Les solutions d’IA visant une meilleure compréhension des écosystèmes et de la biodiversité sont particulièrement intéressantes. En 2017, Microsoft lançait par exemple son programme AI for Earth, qui accorde des subventions aux projets utilisant l’IA pour améliorer les connaissances et répondre aux enjeux environnementaux dans quatre domaines : le changement climatique, l’agriculture, la biodiversité et l’eau. C’est dans le cadre de ce programme que le géant du Web organise un concours de projets innovants en partenariat avec la National Geographic Society.
Google investit aussi ce terrain. L’entreprise s’est par exemple associée au NOAA Pacific Islands Fisheries Science Center pour exploiter quinze ans d’enregistrements sous-marins grâce à un réseau neuronal convolutif capable de détecter les chants de baleines à bosse. Objectif : mieux suivre les déplacements des cétacés et les protéger.
Pour en savoir plus :
Microsoft and National Geographic Society announce AI for Earth Innovation grantees
Acoustic Detection of Humpback Whales Using a Convolutional Neural Network
L’IA pour réaliser des économies d’énergie
Le rapport Donner un sens à l’intelligence artificielle de Cédric Villani souligne également la contribution de l’IA dans l’optimisation de la gestion de nos ressources, notamment énergétiques. Par exemple, les smart grids ou l’industrie 4.0 exploitent l’IA en association avec d’autres technologies pour rendre la gestion de l’énergie dans la ville ou l’usine plus efficace en coordonnant capacités et besoins de la façon la plus efficiente possible. L’IA de demain devra toutefois être moins consommatrice d’énergie grâce à des solutions novatrices comme la mémoire vive universelle, qui pourrait réduire la consommation électrique des centres de données de 20 %.
La start-up française Sensing Vision aide ses clients, en particulier les collectivités locales, à optimiser l’efficacité énergétique de leurs bâtiments grâce à des solutions associant IA et IoT. La promesse : réduire de 20 à 40 % la consommation d’énergie.
Concrètement, les dispositifs intègrent des capteurs connectés à un réseau LoRaWAN qui collectent des mesures en temps réel (température, humidité, luminosité, fréquentation). Ces données sont acheminées vers une plateforme cloud où elles sont traitées par des algorithmes d’IA et croisées avec d’autres données telles que la météo, les agendas d’occupation, etc. Cela permet à la fois d’adapter le réglage des systèmes techniques (chauffage, climatisation) pour mieux répondre aux besoins et de détecter d’éventuels dysfonctionnements.
L’IA et la beauté personnalisée
L’IA révolutionne aussi l’industrie de la beauté, en particulier l’apprentissage automatique et le deep learning, qui permettent de développer des applications très intéressantes (de diagnostic, par exemple) basées sur la reconnaissance faciale. L’objectif est de proposer des conseils personnalisés et des produits cosmétiques sur mesure pour une beauté adaptée à tous.
L’Oréal est très actif dans ce domaine. Son département Recherche et Innovation développe des technologies basées sur l’intelligence artificielle pour créer “les cosmétiques de demain”. Le Groupe soutient par ailleurs des start-up de la “beauty tech”, et a déjà déployé plusieurs applications pour ses marques. En 2018, L’Oréal Professionnel a par exemple lancé Style My Hair, un simulateur de coloration 3D permettant aux clientes de tester différentes teintes de coloration avant de se rendre chez le coiffeur. Cet outil a été développé en partenariat avec ModiFace, qui a entraîné un réseau de neurones profonds à partir de 220 000 images faciales. La start-up canadienne spécialisée dans les usages de la réalité augmentée et de l’intelligence artificielle dans l’industrie cosmétique a récemment été acquise par le Groupe.
Ensemble, ils ont lancé cette année SkinConsultAI, une application de diagnostic de la peau basée sur l’intelligence artificielle et les recherches scientifiques réalisées par L’Oréal dans le domaine du vieillissement cutané. “En utilisant des méthodes de deep learning, explique L’Oréal sur son site Internet, l’algorithme a été entraîné grâce à 6 000 images cliniques issues des évaluations et des études menées par les équipes de L’Oréal Recherche et Innovation à l’aide des Atlas du Vieillissement Cutané, puis a été testé sur plus de 4 500 selfies pour 3 populations de femmes (Asiatique, Caucasienne et Afro-Américaine), et ce, dans 4 conditions d’éclairage différentes.”