Véritable opportunité pour le futur, le biomimétisme consiste à utiliser les solutions inventées par le vivant, afin de répondre à une problématique posée par nos sociétés, tout en limitant la consommation de matières et d’énergie. Engagée dans les transitions écologiques et énergétiques, la France s’intéresse de plus en plus à cette démarche pluridisciplinaire et organisera même, pour la deuxième année, à Senlis, un salon dédié à cette discipline en plein essor (Biomim’Expo, 29-30 juin 2017). Dans l’Hexagone, sur les 171 laboratoires de la recherche publique travaillant sur des thématiques liées au biomimétisme (selon le recensement du Centre européen d’excellence en biomimétisme de Senlis), 15 sont impliqués dans le domaine de la robotique, des systèmes complexes et du traitement de l’information.
De la fourmi à l’algorithme
Ainsi, à l’université Paul Sabatier de Toulouse, l’équipe du docteur Guy Theraulaz (Centre de recherche sur la cognition animale), les chercheurs étudient l’intelligence collective des fourmis pour développer des algorithmes utilisés dans les domaines de la robotique, de l’informatique et des télécommunications.
Ils développent des applications basées sur le filtrage d’informations inspirées du comportement des insectes sociaux. Objectif : augmenter le niveau de fiabilité des informations (pour les algorithmes de recommandation sur les sites Internet d’achat ou de réservation, par exemple) et améliorer les capacités de collaboration, de coopération et de recherche collective d’informations.
La recherche s’intéresse également aux capacités de perception des animaux. En observant le comportement de certains poissons (le poisson-éléphant notamment), l’équipe de Frédéric Boyer (Laboratoire des sciences du numérique de Nantes et Institut Mines-Télécom) a développé un « sens électrique » qui permet aux robots sous-marins de reconnaître la forme des objets et de se déplacer plus facilement. Aujourd’hui, un projet européen vise à mettre en place un banc de robots coopératifs sous-marins dotés du sens électrique pour la surveillance des canaux de Venise.
Le grillon, source d’inspiration
A-t-on jamais vu deux mouches entrer en collision ? Fort de ce constat, Stéphane Viollet, directeur de recherches et responsable de l’équipe biorobotique de l’Institut des sciences du mouvement (CNRS/Aix-Marseille Université), a mis au point le premier œil de mouche artificiel. Nommé CurvACE, cet œil à facettes ultraperformant dote quelques robots aériens d’une vision panoramique unique grâce à plusieurs centaines de pixels. Ce projet débuté en 2014 ouvre la voie à des applications en domotique, en automobile ou encore en robotique pour l’évitement d’obstacles.
Toujours dans le domaine des insectes, le grillon est une source d’inspiration incroyable pour les scientifiques… Doté de poils extrêmement sensibles, il peut s’échapper de manière fulgurante lors de l’attaque d’un prédateur.
Cette performance inhabituelle a incité Jérôme Casas, de l’Institut de recherche sur la biologie de l’insecte de Tours, à mettre au point des microcapteurs électroniques qui reproduisent le mode de circulation de l’information développé de façon unique par les poils du grillon. Dans un objectif à long terme, ces capteurs pourront être utilisés dans les domaines technologiques (par exemple, une caméra qui capte des flux) ou médicaux.
Un parasite très utile
Et que dire de la guêpe, ou plus précisément de l’un de ses parasites… Pour les chercheurs en instrumentation optique du Centre français de recherche aérospatiale, les yeux du Xenos peckii ont inspiré l’architecture de la Multicam. Technologie optronique pour l’imagerie en astronomie ou intelligence militaire, la caméra Multicam est un empilement de plusieurs réseaux de microlentilles qui forment un ensemble de microcaméras juxtaposées. Une architecture très compacte, entièrement intégrée au voisinage de la rétine infrarouge, qui permet de produire des images grand format de très bonne résolution.