• Des fibres optiques directement intégrées dans les batteries « intelligentes » permettent d’optimiser la recharge de ces dernières grâce à l’extraction de données clefs comme la pression, la température, etc.
• Des start-up comme Gouach proposent aux industriels des outils pour créer des batteries plus durables, car modulables et plus facilement réparables, tout en les transformant en objets connectés.
Pour Jean-Marie Tarascon, professeur au Collège de France titulaire de la chaire « Chimie du solide et énergie » et médaille d’or du CNRS, les batteries n’ont presque aucun secret. Ce secteur pose des questions de souveraineté technologique, d’où l’implantation de « gigafactories » (usines géantes) en Europe comme l’illustre l’inauguration de l’usine Verkor, à Bourbourg (59) mi-décembre 2023. « Si on regarde les ressources de matières premières, en 2030, tout le lithium qui sera fabriqué sera épuisé dans les accumulateurs, ce qui pose deux questions : quelles solutions alternatives existe-t-il, et comment recycler le lithium ? », souligne le chercheur. « L’idée serait de remplacer le lithium par le sodium. » Ses recherches sur les batteries à base de sodium ont donné naissance à la société Tiamat, qui entend créer une première usine en mesure de produire plus de 500.000 batteries par jour sur la technologie sodium-ion, l’une des alternatives possibles. « Cette technologie dispose d’une bonne performance puisqu’elle offre la possibilité de proposer des batteries capables de tenir 10.000 cycles à 80%, et de 2.000 cycles à 55 degrés. » Le sodium-ion ne pourra cependant jamais remplacer le lithium-ion en termes d’autonomie, car le poids supérieur du sodium le rend moins adapté que le lithium pour les véhicules électriques.
On va mettre des capteurs pour savoir ce qu’il se passe à l’intérieur des batteries
De la fibre optique pour récupérer des données sur les batteries
« On pousse également le concept de batteries intelligentes, c’est-à-dire qu’on va mettre des capteurs pour savoir ce qu’il se passe à l’intérieur », explique le chercheur. L’idée : établir un passeport électronique de l’état de santé de la batterie. Une fibre optique dotée d’un capteur appellé réseau de brins va modifier la longueur d’onde optique en fonction d’éventuels changements (température, pression, etc.). On peut avoir une image d’un produit commercial dans des conditions réelles d’utilisation. La fibre permet donc de suivre la dynamique chimie dans les batteries. Il devient possible de connaître les paramètres au sein d’une batterie dans un véhicule, ce qui n’était pas possible jusqu’à présent. « On va pouvoir ainsi l’optimiser : on va utiliser non pas 75% de la quantité d’énergie, mais 80% à 90%. On pourra également faciliter leur seconde vie. Et enfin il sera possible d’envoyer ces informations au réseau (Vehicle-To-Grid ou V2G) », ce qui permettra d’optimiser davantage la recharge.
Gouach, une start-up française au cœur des batteries intelligentes
La réglementation européenne impose que toutes les batteries devront être réparables en 2027. C’est l’une des raisons qui ont poussé la start-up bordelaise Gouach à proposer aux industriels ou opérateurs de flottes de vélos ou trottinettes électriques un outil destiné à concevoir des batteries plus durables et connectées. « Nous proposons un outil en ligne qui permet à qui que ce soit de configurer ses batteries avec des cellules qui ne sont ni collées ni soudées », explique Maël Primet, l’un des cofondateurs de la société. « Nous imprimons en 3D un échantillon pour permettre aux clients de la tester et, s’il est convaincu, on met en place une production avec nos usines partenaires. » Ce mode de conception permet de proposer des batteries réparables, sans avoir besoin d’en changer l’intégralité. « Nous avons développé notre propre Battery management system (BMS) qui permet de savoir à l’avance si une batterie risque de surchauffer ou s’il faut changer une ou plusieurs cellules. » Pour évaluer l’impact environnemental de l’utilisation de telles batteries, Gouach a fait réaliser une étude par un cabinet de conseil : « Au total, sur un cycle de vie de batterie de cinq ans, la réparabilité permet de diminuer les émissions de CO2 de 50%. » L’implantation de gigafactories en France métropolitaine permettra bientôt à des start-up comme Gouach de se fournir en cellules directement dans l’Hexagone, ce qui réduira encore l’empreinte carbone des batteries.
Sources :
Tiamat veut mobiliser 100 millions pour sa première usine de batteries
Batteries sodium-ion : « une première mondiale dont nous sommes très fiers »
En savoir plus :
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