• Depuis 2023, avec l’essor des modèles de diffusion d’image, les scientifiques sont en mesure de convertir des réactions cérébrales en images fidèles, permettant de comprendre les mécanismes des rêves, voire de générer des vidéos à partir de l’activité cérébrale.
• D’autres études montrent qu’il est possible d’interpréter les pensées humaines. Ces progrès soulèvent des questions de confidentialité mentale et éthique quant à la protection des pensées des individus.
Les avancées technologiques dans le domaine de l’analyse des IRM connaissent une folle croissance depuis 2020. Des entreprises telles qu’Ezra utilisent désormais des scans IRM corporels complets pour aider les professionnels de la santé à détecter précocement le cancer, tandis que Zebra Medical Vision (racheté par Nanox) utilise des outils pilotés par l’IA pour détecter l’ostéoporose potentielle dans les radiographies, ainsi que le cancer du sein potentiel dans les mammographies.
Reconstituer les images mentales
Le deep learning offre de nombreux avantages aux établissements de santé : il permet d’analyser davantage d’images en un moindre temps sans compromettre la qualité de ces analyses, ce qui améliore par conséquent le parcours de soin des patients. Mais l’utilisation des IRM et de l’intelligence artificielle va plus loin : il est désormais possible de « lire » les pensées, et de reconstituer des images mentales ou des vidéos grâce à l’IA.
Des scientifiques ont été capables de générer une vidéo en analysant l’activité cérébrale du cerveau, en couplant les données récoltées via IRM avec le modèle de diffusion d’image Stable Diffusion
Une équipe du National Institute of Quantum Science and Technology a enregistré les réactions cérébrales de participants observant 1200 images diverses, puis a entraîné une intelligence artificielle à corréler ces signaux à des images. Cette avancée a permis de convertir les signaux cérébraux en valeurs numériques pour recréer des images. Les résultats ont abouti à une représentation fidèle d’un léopard. Pour les scientifiques, il s’agit d’une avancée qui permettra, entre autres, de comprendre davantage les rêves des patients. En mai 2023, des chercheurs de l’Université nationale de Singapour et de celle de Hong Kong ont publié un article sur arXiv dans lequel ils indiquent avoir été capables de générer une vidéo en analysant l’activité cérébrale du cerveau, en couplant les données récoltées via IRM avec le modèle de diffusion d’image Stable Diffusion. Ils ont ainsi mis en place un décodeur capable d’apprendre progressivement à partir de signaux cérébraux acquis, tout en s’entraînant avec des bases de données d’images.
Lire dans les pensées
Enfin, une étude publiée également en mai 2023 dans Nature Neuroscience dévoile l’utilisation de l’IRM et de l’intelligence artificielle pour interpréter les pensées humaines. Les scientifiques ont cartographié les réponses cérébrales aux mots et significations avec un décodeur linguistique. Les participants, exposés à des récits auditifs lors de séances de 16 heures en IRM, ont permis de cartographier les réponses cérébrales traitant le langage. Le modèle linguistique neuronal, utilisant GPT-1, a prédit les réponses cérébrales aux discours perçus, reconstituant même le sens général des phrases entendues. Les pronoms personnels ont posé problème au décodeur, mais ce dernier a pu saisir l’essence même de récits improvisés ou de films silencieux. Les pensées resteront-elles le domaine ultime de la confidentialité ? Le législateur et les autorités de santé pourraient proposer de nouveaux cadres afin d’établir une approche éthique portant sur la propriété et l’exploitation des pensées des individus.
Réduire le temps d’examen
En France, une équipe de chercheurs du CEA (Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives) a cherché à réduire le temps d’examen tout en conservant une excellente qualité des images et s’est classée en 2020 deuxième du concours international Brain fastMRI 2020 Challenge. Ce projet de recherche collaboratif entre Facebook AI Research (FAIR) et NYU Langone Health vise à étudier l’utilisation de l’intelligence artificielle (IA) pour rendre les examens IRM jusqu’à dix fois plus rapides. « Mon travail, explique Philippe Ciuciu, consiste d’une part à développer des méthodes d’acquisition accélérée d’images IRM, et d’autre part à améliorer le processus de reconstruction d’images à partir des données brutes collectées par le scanner IRM. » Le CEA a présenté une nouvelle méthode d’intelligence artificielle basée sur des réseaux de neurones. « Notre modèle part des données brutes et alterne itérativement les étapes d’amélioration dans l’espace image et de compatibilité avec les données initiales. C’est ce qu’on appelle un système déroulé de réseaux de neurones. Nous avons ajouté à cela un processus de mémoire entre les différentes itérations et de toutes les étapes, celles-ci améliorant considérablement la qualité image et le temps de reconstruction. Les réseaux de neurones artificiels permettent de reconstituer des images d’une qualité similaire à celles obtenues à partir de jeux de données complets, mais en ne partant que d’une faible fraction de ces données. L’intérêt de notre méthode est d’être bien plus performante que les algorithmes classiques lorsque les données sont lacunaires, en l’occurrence quand on a accès à seulement un huitième au lieu d’un quart d’entre elles. »
Sources :
https://www.cea.fr/presse/Pages/actualites-communiques/sante-sciences-du-vivant/innovations-technologiques-IRM.aspx
https://fastmri.org/