Alliance O-RAN : ouvrir les réseaux 5G

Les réseaux 5G nécessitent de nouvelles architectures pour le réseau d’accès ou RAN (Radio Access Network). Dans le cadre de ce changement majeur, l’alliance mondiale O-RAN (Open RAN) crée les conditions pour un RAN plus ouvert à de multiples fournisseurs et plus innovant. De quoi dépend le succès d’un tel concept ?

A terme, une nouvelle communauté de fournisseurs de réseaux mobiles trouvera des débouchés auprès d’opérateurs au niveau mondial

L’alliance O-RAN (Open-Radio Access Network) rassemble de nombreux acteurs du monde des télécoms autour de l’ouverture des réseaux d’accès. Cinq opérateurs, AT&T, China Mobile, Deutsche Telekom, NTT DoCoMo et Orange, ont annoncé en février 2019 la création de cette alliance mondiale. Leurs objectifs communs : favoriser l’innovation et l’arrivée de nouveaux fournisseurs sur ce marché et rendre ainsi les réseaux d’accès les plus innovants et flexibles possibles.

Favoriser l’arrivée de nouveaux acteurs

Trois fournisseurs (Ericsson, Huawei, Nokia) dominent le marché des réseaux mobiles. Cette situation pèse sur le coût des équipements et sur les capacités d’innovation. En produisant des spécifications d’interfaces réellement ouvertes, l’alliance O-RAN entend permettre à n’importe quel fournisseur de proposer des solutions matérielles et logicielles fonctionnant avec ces architectures 5G standardisées. Grâce à ces interfaces, O-RAN permet de découper virtuellement le réseau d’accès en morceaux plus petits. La barrière à l’entrée en termes de R&D est alors plus basse ; cela favorise l’accès au marché à de nouveaux acteurs.

Dans ce domaine, le groupe Orange joue un rôle déterminant. Si l’opérateur est contributeur de l’ensemble des 8 groupes de travail d’O-RAN, il est leader du groupe qui définit les interfaces ouvertes pour la station de base en tant que telle, celle qui gère les “couches basses” du réseau mobile. “Au fil du temps”, explique Olivier Simon, responsable innovation sur les réseaux radio chez Orange, “le réseau d’accès est devenu un système très complexe qui compte sans cesse de nouvelles fonctions. Pour un nouvel acteur, il est donc difficile de développer l’ensemble de ces fonctions. Avec O-RAN, on crée une architecture et des interfaces ouvertes, et on permet à de nouveaux entrants de développer certaines parties du réseau d’accès, et pas nécessairement sa totalité. “A terme, une nouvelle communauté de fournisseurs pourra ainsi trouver des débouchés auprès d’opérateurs au niveau mondial, même lorsqu’ils ne proposent que des sous-systèmes du réseau d’accès”. Les spécifications O-RAN permettent ainsi une plus grande flexibilité. Par exemple, “là où on souhaite utiliser des réseaux 4G et 5G de deux fournisseurs différents, les spécifications O-RAN permettent de simplifier l’intégration des deux réseaux. Une autre option qui devient possible est l’utilisation d’antennes actives 5G branchées sur un réseau issus de deux fournisseurs différents”, détaille Olivier Simon.

Virtualisation des fonctions réseau

L’architecture RAN du futur utilise des fonctions réseau virtualisées déployées sur des Datacenter qui utilisent des serveurs aussi génériques que possible. Dans ce domaine, O-RAN tient une place prédominante, confirme Olivier Simon : “O-RAN fournit un guide pour opérer cette longue et complexe transformation de manière homogène, tout en réalisant des économies d’échelle”.

Là encore, Orange occupe une place importante dans ce processus, puisque leader du groupe de travail O-RAN chargé de la définition de l’infrastructure d’accueil des fonctions réseau (NFVI Network Function Virtualization Infrastructure). Les opérateurs, grâce aux spécifications produites au sein d’O-RAN sur la virtualisation des fonctions du réseau, utilisent des éléments d’infrastructure validés par tous. Selon Olivier Simon, “le but de l’alliance est de faire en sorte, par exemple, que tous les opérateurs qui utilisent les spécifications O-RAN partent de la même définition de ce qu’on appelle un Datacenter. Les fournisseurs de fonctions réseaux s’appuient ensuite sur cette définition, ce qui facilite la phase d’intégration et la gestion des cycles de vie”.

Partage de l’effort d’intégration

“La virtualisation et l’ouverture promises par O-RAN ont un prix”, prévient cependant Oliver Simon. “C’est la complexité de la phase de test et d’intégration”. En effet, si plusieurs industriels interviennent sur un réseau d’accès, il est plus difficile de garantir que le système fonctionne correctement. Un problème donné peut provenir d’un seul intervenant ou de plusieurs à la fois.

Aujourd’hui, les équipementiers eux-mêmes effectuent les tests et l’intégration de leurs propres solutions. Demain, il faudra identifier un rôle d’intégrateur pour réaliser cette tâche.

Afin de minimiser les couts d’intégration, les opérateurs d’O-RAN travaillent à la mise en place de laboratoires communs d’intégration et de certification qui permettront de mutualiser la majeure partie de cet effort.

Ouverture du code source : innovation et flexibilité

En avril 2019, O-RAN s’est associé à la Linux Foundation pour créer la “O-RAN Software Community”. Sa fonction consiste à délivrer du code open source sur un certain nombre de modules qui composent le réseau d’accès. Ces modules logiciels, comme certaines parties du réseau 5G, ne sont ainsi plus exclusifs à un fournisseur donné. Outre l’ouverture à de nouveaux acteurs, chacun peut mutualiser ses développements logiciels “en boîte blanche” (en pleine visibilité) avec ceux des autres parties prenantes, et gagner ainsi du temps et de l’argent. La publication du premier code open source aura lieu en novembre 2019.

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