● Cette caméra, encore au stade de prototype, ne capte pas toute la lumière, mais permettrait de créer des images suffisamment explicites pour permettre à des robots, comme les aspirateurs autonomes, de fonctionner.
● Ce type d’outil serait plus cher à produire, mais permettrait aux industriels de fournir des garanties quant au respect de la vie privée, même si leur utilisation est pour l’heure exclue à des usages avancés comme pour les véhicules autonomes.
Des téléviseurs qui écoutent les conversations privées des particuliers, un aspirateur qui a filmé une femme dans ses toilettes… Les objets connectés ne garantissent pas encore le respect de la vie privée. Les solutions existantes pour sécuriser davantage les données captées sont toujours vulnérables. « Dès qu’une image est sauvegardée sur un disque dur, quelqu’un peut y accéder, entrer dans un système ; ou encore, ces photos ou vidéos peuvent être accidentellement divulguées », explique Adam Taras, ingénieur à l’université de Sydney. Dans un article scientifique, il détaille avec ses collègues de l’université de technologie du Queensland la création d’une caméra qui ne pourrait pas tout capturer, mais qui permettrait aux robots et objets connectés de rester fonctionnels, afin de préserver la vie privée. « Au lieu de changer la manière dont l’image est traitée, on change la manière dont les images sont captées. On propose de ne pas capter toute l’image en modifiant la lentille afin de supprimer toute information relative à la vie privée avant qu’elle ne soit enregistrée. »
Si les données sont piratées ou accidentellement divulguées en ligne, elles sont inexploitables.
Au lieu de capturer toute la lumière possible, la caméra proposée par les chercheurs est en mesure de filtrer la lumière entrante et de ne sélectionner qu’une partie du signal capté. « Les signaux électroniques provenant des capteurs sont traités dans le matériel avant d’être convertis en valeurs numériques et sauvegardés. » Ainsi, des données piratées ou accidentellement divulguées en ligne seraient inexploitables. L’objectif est néanmoins de permettre aux objets connectés, comme les aspirateurs-robots, de fonctionner sans dégradation de leurs capacités. En réalisant une simulation avec des images altérées, les chercheurs ont pu prouver que le système robotique était en mesure d’exécuter ses tâches sans problème. Pour réaliser cette simulation, les chercheurs ont pris des photographies provenant d’un capteur traditionnel et ont utilisé un programme pour les modifier comme si elles avaient été modifiées par un capteur spécifique, qui enlève des parties des photos.
« De prochains travaux pourraient nous permettre d’aller plus loin et de proposer des applications plus vastes, tant en matière de détection d’objets que de classification, à savoir des fonctions pertinentes pour l’Internet des Objets. » Inutile toutefois d’imaginer de tels dispositifs sur des véhicules. « Ce type d’outil est pertinent pour des applications à faible risque. Ce serait potentiellement possible de construire ce type d’architecture, mais ce serait un véritable défi d’ingénierie », précise Adam Taras. « L’avantage est que notre approche n’est pas gourmande en ressources informatiques, mais on perd en effet des informations et des détails, ce qui rend certaines applications pour l’heure impossibles. »
Ce type de caméra étant spécifique, leur coût serait plus cher pour les industriels. « Pour l’heure les simulations ont été réalisées, mais le prototype fait encore 30 cm par 30 cm. Nous pensons qu’il sera réalisable en sachant que le plus grand défi est d’implémenter le filtrage optique. Pour l’heure, les chercheurs espèrent pouvoir le faire avec un miroir sur moteur ou une matrice de micromiroirs (digital micromirror device, DMD), c’est-à-dire un assemblage de nombreux miroirs microscopiques. Pour la partie logicielle, ceux étant déjà installés dans les objets connectés doivent être adaptés. Ce n’est pas là où réside la difficulté de la construction d’un tel dispositif puisque ces logiciels sont modulaires et s’adaptent à différentes caméras ou capteurs, comme les LiDAR.
Sources :
Adam K. Taras, Niko Sünderhauf, Peter Corke, Donald G. Dansereau, Inherently privacy-preserving vision for trustworthy autonomous systems: Needs and solutions, Journal of Responsible Technology, Volume 17, 2024, 100079, ISSN 2666-6596